Cette question a fait le lit à un débat épique entre des hommes ayant des vécus et des expériences différenciés en fonction de leurs trajectoires de vie, des rencontres faites ici et là et de la nature des partenaires, c’est-à-dire la qualité des femmes. Sur le plateau masculinisé de #onseparlecash de A+ BENIN, les arguments étaient bien nourris. Entre le poids de la société et le choix assumé de vivre ses passions propres loin des codes longtemps admis, les hommes préposés au mariage ont tranché la question.
Il me semble utile, à cette étape de la réflexion, de vous soumettre à une nouvelle question qui s’inscrit dans le continuum de celle posée par l’animatrice Axelle Frida Elisha : « 𝑳’𝒂̂𝒈𝒆 𝒆𝒔𝒕-𝒊𝒍 𝒍𝒆 𝒔𝒆𝒖𝒍 𝒄𝒓𝒊𝒕𝒆̀𝒓𝒆 𝒐𝒖 𝒆𝒔𝒕-𝒊𝒍 𝒍’𝒆́𝒍𝒆́𝒎𝒆𝒏𝒕 𝒅𝒆́𝒕𝒆𝒓𝒎𝒊𝒏𝒂𝒏𝒕 𝒑𝒐𝒖𝒓 𝒍𝒆́𝒈𝒊𝒕𝒊𝒎𝒆𝒓 𝒖𝒏 𝒑𝒐𝒖𝒗𝒐𝒊𝒓 𝒎𝒂𝒔𝒄𝒖𝒍𝒊𝒏 𝒅𝒂𝒏𝒔 𝒖𝒏 𝒄𝒐𝒖𝒑𝒍𝒆 ? ».
Répondre par oui signifierait donc qu’il est mauvais pour un homme d’épouser une femme beaucoup plus âgée que lui. Cette réponse affirmative (nous le verrons plus bas) traduit aussi une crainte chez l’homme soucieux de préserver un pôle d’influence sans concession dans le couple. À l’inverse, une réponse négative signifierait, non pas, qu’il est bon d’épouser une femme beaucoup plus âgée, mais plutôt qu’il existe mille et une hypothèse de s’épanouir réciproquement dans un couple dans lequel l’homme est moins âgé que son épouse. La réponse négative ouvre donc une porte des possibilités et des conditions. Je laisse volontiers les spécialistes en thérapie de couple s’occuper de cet aspect du sujet. Ma »dada » consœur experte Cyra SEKE de Love Power Seke saura décliner des pans entiers de ces possibilités et conditions.
Au-delà de tous les choix, le sujet est révélateur des codes institués en surbrillance dans les rapports entre le sexe masculin et celui féminin. Le sujet pose aussi la question liée au rapport que nous avons avec l’âge et le droit d’aînesse si cher et si déterminant dans la transmission du pouvoir dans nos sociétés.
Au-delà d’être un indicateur des étapes de croissance (enfance, adolescence, jeunesse et vieillesse), l’âge est aussi un construit social qui permet de poser des bornes entre générations. Il permet aussi d’hiérarchiser les classes. Pendant longtemps, l’âge a été un critère fondamental de certification de la maturité.
À tout le moins, il a permis d’avoir une sorte d’accord partagé sur la présomption de maturité. Or, le mariage nous offre un espace d’expression, de déploiement, de cohabitation ou de confrontation des pouvoirs entre l’homme et la femme.
Les conventions coutumières ont habilité l’homme dans la peau du Chef avec des obligations qui font de lui la seconde figure paternelle de son épouse. Quoi de plus normal que le Chef soit celui ayant l’âge le plus élevé dans le couple ? L’affirmation du pouvoir masculin auto-centré sur l’âge ne peut laisser aucune chance à un couple dans lequel l’homme serait moins âgé que la femme. Mais un effort de prise en compte d’autres critères de légitimation du pouvoir masculin et, par-delà, de définition d’autres modèles de couple pourraient sauter les verrous.
Oui, l’homme peut accepter se marier à une femme plus âgée si l’espace conjugal n’est plus vu comme un lieu d’expression d’une domination mais plutôt comme un lieu de cohabitation, de responsabilité dans la complémentarité. Le poids dissuasif de l’environnement social reste un facteur clé dans l’échec ou la réussite du choix.
Enfin, une certitude restera: il ne peut y avoir une prescription prêt-à-porter en matière de choix d’un conjoint ou d’une conjointe. Le choix reste personnel et motivé par des raisons insaisissables par les regards étrangers.
Joël Tchogbé, Sociologue